Penser la tragédie écologique
Par Simon
Charbonneau.
L’auteur du Prix de la démesure revient vers nous avec une tribune percutante et engagée sur la
manière dont les médias abordent l’écologie.
Contrairement à ce qui se
passait il y a encore moins de trente ans, les informations relatives au
désastre écologique en cours ne manquent pas, quitte d’ailleurs à présenter le
défaut de la surabondance.
Mais, c’est surtout la forme
et le contenu de cette présentation qui pose problème. Observons d’abord le
fait significatif que ces informations font toujours l’objet d’un traitement
particulier comme dans « Le Monde » où une page spéciale leur est
consacrée sous le titre Planète alors que son supplément économique ne fait
jamais mention des problèmes écologiques posés par ce qui est toujours présenté
comme des avancées économiques ou technologiques pour l’humanité. Comme l’huile
et l’eau, ces deux catégories d’informations ne sont jamais mises en interface
au risque de masquer les vraies questions.
D’autre part, l’espace
médiatique a toujours tendance à simplifier ou à tordre le sens des
informations relatives aux questions d’environnement par le jeu de slogans ou de
formules stéréotypées qui prétendent tout faire comprendre à l’opinion !
Il y a des abus de langage qui en fait sont destinées à occulter la gravité du
désastre, tels que « durable », « transition »,
« économie circulaire », etc. destinés à éviter toute remise en
question, en particulier de notre mode de vie occidental mondialisé.
On peut même dire que les
pratiques rhétoriques dans ce domaine sont celles de la « novlangue »
chère à Orwel dans son « 1984 » ! Dans une société qui cultive
l’obsolescence de nos objets quotidiens et de nos cadres de vie, que veut donc
dire un oxymore comme le « développement durable » ???
Il y a même des expressions
étonnantes comme « sauver la terre », reprises d’ailleurs par des
écolos qui se veulent durs et purs alors qu’il s’agit là du comble de l’esprit
prométhéen à l’origine de toutes les dérives actuelles et à venir comme la
« géo ingénierie » censée répondre au réchauffement climatique. Comme
l’a montré une récente vidéo du « National Géographic », ce n’est pas
la planète qui est menacée de destruction, mais l’humanité elle-même et ceci
par sa propre faute.
Autrement dit, ce qu’il faut
maintenant envisager sérieusement, c’est l’hypothèse du suicide de l’humanité
par son développement incontrôlé rendant finalement la terre inhabitable, cette
dernière étant parfaitement apte avec le temps à s’en remettre par la suite,
malgré des écosystèmes certes transformés, mais aussi régénérés !
Compte tenu de l’accélération
des processus de destruction en cours, c’est à l’évidence cette hypothèse qu’il
faut retenir, aussi tragique soit-elle. Non pas pour s’abandonner à « la
fatalité du progrès » comme certains esprits cyniques nous le laissent
entendre, mais au contraire pour prendre toutes les dimensions du défi !
C’est ici que se situe
d’ailleurs le nœud du problème, à savoir le fait d’avoir le courage d’une prise
de conscience qui concerne chacun de nous, malgré le fait qu’il soit vraiment
tard pour s’y attaquer au regard des premières alertes officielles datant d’au
moins cinquante ans. Or, jusqu’à présent, la majorité des pays responsables de
cette situation dramatique, en particulier l’oligarchie des dirigeants, a
pratiqué une politique de faux semblants. L’Accord de Paris de 2016 en est
l’illustration éclatante. Dans un même temps, cette majorité a continué à faire
prospérer les causes de destruction en raison de son addiction à la religion de
la croissance. Significativement, les seules réponses officielles à ce défi
sont toujours d’ordre technoscientifique et économique, reprenant ainsi la manière
de penser qui est à l’origine des problèmes que l’on prétend résoudre !
Par delà le
« présentisme » de notre société et les fausses questions qu’elle
véhicule, celle de l’avenir de l’espèce humaine reste donc aujourd’hui la
principale à laquelle il serait temps de penser. Mais peut-être nous
dépasse-t-elle et est-ce trop tard en raison de la puissance du processus
en cours illustrant l’anthropocène ?
N’hésitez pas à réagir sur ce sujet dans les commentaires !
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